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Interview d’Armèle Malavallon

17 Mai 2015

soleilnoirQuel est le premier livre que vous vous souvenez avoir lu ?

Les malheurs de Sophie de la comtesse de Ségur, dans une vieille édition originale avec couverture épaisse rouge et dorée et papier jauni. Une relique familiale. J’avais l’impression de lire un vestige du temps passé. Et je me souviens m’être imaginé cette comtesse désoeuvrée en train d’écrire ces histoires. Bizarrement, la vie de l’auteur me faisait plus rêver que les mésaventures de l’héroïne.

J’imaginais cette belle comtesse, dans son château, assise à son secrétaire devant son lit à baldaquin et suçoter sa plume avant de la tremper dans l’encrier.

Dans quelles circonstances avez-vous écrit votre première nouvelle, votre premier roman ?

J’ai écrit ma première nouvelle un peu par hasard. Je suis tombée sur l’annonce d’un concours de nouvelles dans les pages « culture » d’un magazine à potins (Voici pour ne pas le nommer). J’avais du temps, le thème « l’amour au travail » m’a inspirée, alors je me suis lancée et j’ai gagné. Premier contrat d’auteur, première publication dans un recueil de nouvelles collectif. Prémices de mes amours futures avec Prisma Presse… Le destin est farceur.

Quant à mon premier roman, je l’ai écrit à mon retour du Vietnam, où j’ai vécu plusieurs années. Il est largement inspiré de cette expérience et de mon parcours de vétérinaire.

Pourquoi écrivez-vous ?

Parce que j’ai sans cesse des phrases, des mots qui courent dans ma tête et qu’à un moment de ma vie, j’ai eu le temps de les coucher sur le papier. Et j’y ai pris goût.

En tant que vétérinaire, pourriez-vous écrire un roman sur la maltraitance animalière, une cause qui vous tient à coeur ?

Je suis vétérinaire donc chirurgien. J’ai disséqué des cadavres, j’ai passé des heures dans un abattoir, j’ai opéré des animaux… J’ai le coeur bien accroché. La vue du sang ne me fait pas peur. Par contre, la maltraitance des animaux est quelque chose qui me fait souffrir terriblement. C’est physique. Je ne supporte pas.

Je pense qu’il me serait très difficile d’écrire un roman sur le sujet parce que j’aurais un mal fou à me mettre dans la peau d’une personne qui maltraite les animaux. Je ne comprends pas comment on peut faire ça. Ça rejoint un peu la maltraitance des enfants qui me bouleverse tout autant.

Ça peut paraître bizarre, mais j’ai le sentiment que les animaux, comme les (très jeunes) enfants, n’ont pas les clés pour comprendre ce qui leur arrive et de ce fait, leur souffrance est encore plus terrible à supporter. Ils sont démunis, ne comprennent pas pourquoi on leur fait subir des atrocités, alors qu’un homme ou une femme adulte, même s’ils souffrent autant lorsqu’ils sont maltraités, comprennent, eux, s’ils ont deux doigts de jugeote, qu’ils ont affaire à un pervers ou un psychopathe.

Vous êtes également chroniqueuse littéraire. Parlez des livres des autres aide-t-il l’auteur qui est en vous ?

Bien sûr. Le fait de lire les autres, d’analyser leur écriture, leur style, leur façon d’appréhender certains sujets, de mettre en place une histoire, un scénario, me permet d’apprendre, d’avancer, de savoir vers quoi je veux aller, quelle direction je veux faire prendre à mon travail ou au contraire ce que je veux absolument éviter.

Et puis j’ai la chance de pouvoir échanger avec la plupart des auteurs dont je parle dans mes chroniques, c’est très enrichissant. Je me nourris de ces échanges pour rédiger mes chroniques et ça nourrit aussi mon travail d’auteur.

Comment s’est passé le passage de l’écriture de nouvelles à l’écriture d’un roman ?

En fait, ça s’est passé dans l’autre sens.

J’ai d’abord écrit un roman, mon premier, inspiré de mes années au Vietnam. Il a fini dans un tiroir. Du coup, je me suis mise à la nouvelle. Parce que je ne me sentais pas le courage de me lancer de nouveau dans l’écriture d’un roman qui finirait lui aussi au panier.

L’envie était là, les idées aussi, mais la flamme était un peu éteinte. Les nouvelles ne me demandaient qu’une petite étincelle.

Ensuite, je suis passée aux chapitres de roman lorsque j’ai participé au polar interactif lancé par l’émission de Michel Field Au Field de la nuit. Ça a donné le polar Connexions (Plon) dans lequel j’ai écrit deux chapitres. Ça a ravivé la flamme et m’a donné l’envie de m’essayer au polar. C’est à ce moment-là que j’ai commencé l’écriture de Soleil Noir.
(Toutes ces histoires de flamme, je ne l’ai pas fait exprès, mais ça colle pile poil avec le feu de Soleil Noir !)

Parallèlement, j’ai intégré le très envié cercle des exquis auteurs de l’Exquise Nouvelle, projet d’écriture collaborative créé par Maxime Gillio et David Boidin. J’ai participé en tant qu’auteur à la saison 2, puis en tant qu’organisatrice (et auteur) à la saison 3, Les aventures du Concierge Masqué.

Grâce à cette expérience, j’ai rencontré un grand nombre d’auteurs (majoritairement de polar, mais pas que) avec lesquels j’ai eu le plaisir de travailler. Cela m’a beaucoup appris et m’a fait progresser.

Votre premier roman Soleil noir se distingue entre autres par le fort attachement qu’on porte à vos personnages. Comment expliquez-vous cela ?

Je ne sais pas. C’est difficile à expliquer. Peut-être parce que lorsque j’écris, ce sont toujours les personnages qui me viennent en premier. Avant même de trouver une histoire à raconter. Je crois que je ne suis pas une vraie polardeuse, en fait… Pour moi, ce n’est pas forcément l’intrigue qui compte.

Mon premier roman comptait dix chapitres, un chapitre par personnage. Les personnages étaient le coeur de l’histoire. Ce sont eux qui faisaient le roman. J’ai gardé ce fort attachement aux personnages quand je me suis lancée dans le polar.

À quel moment savez-vous que l’histoire que vous racontez est une bonne histoire ?

Jamais. Je doute toujours que mon histoire soit une bonne histoire.

Avez-vous déjà en tête le thème du prochain ?

Là encore, ce sont les personnages qui se sont imposés à moi et qui m’ont donné l’impulsion. Notamment un personnage de tatoueur particulièrement charismatique. Il s’agira d’un roman noir, plus qu’un polar, dont l’action se déroule à Paris. Exit donc le soleil de Montpellier !

Quel est le dernier livre que vous ayez lu ?

La faux soyeuse d’Éric Maravélias, publié dans la mythique collection « Série noire » de Gallimard. Une très belle découverte. Un premier roman noir, très noir, qui vous accroche et vous plonge dans un univers méconnu de la plupart d’entre nous : celui de la drogue et de la banlieue. Là aussi, outre la force du témoignage qui nous donne à voir une réalité souvent ignorée, la réussite du livre réside dans l’intensité des personnages et le style de l’auteur.

C’est pour moi aussi important, voire plus, qu’une bonne histoire.

La question surprise de Maud Saintin

maudChère Armèle, quelle serait la plus belle critique que l’on puisse te faire ? Et tant qu’on y est, quelle serait la pire ?

Toutes les critiques sont intéressantes, bonnes ou mauvaises, du moment qu’elles sont constructives.

C’est sûr que je préfère quand un lecteur me dit qu’il a lu mon livre d’une traite, qu’il a fini à 4h du matin et qu’à cause de moi, il n’a pas dormi de la nuit plutôt qu’on me dise que mon livre est un excellent somnifère. Après tout est question de point de vue.

Je n’ai pas d’idée quant à la plus belle ou la pire critique que l’on pourrait me faire. Sans doute sont-elles encore à venir.

Armèle Malavallon

Armèle Malavallon

Vétérinaire, auteur et chroniqueuse littéraire sur Radio Clapas dans l’émission culturelle Du chien sans l’faire exprès.

A participé au polar interactif Connexions paru chez Plon et lancé par l’émission Au Field de la nuit.

A participé aux deux dernières saisons de l’Exquise Nouvelle : Les sept petits nègres et Les aventures du Concierge Masqué.

Soleil Noir est son premier roman, lauréat du prix VSD du polar 2015.

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