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Interview de Sophie Dabat

29 Mar 2015

11063966_10153116765662310_943255650_oQuel est le premier livre que vous ayez lu ?

Le premier « premier », je ne m’en souviens pas vraiment (je crois que c’était un abécédaire avec un personnage nommé Béatrice), mais le premier dont je me souvienne, c’était un Roald Dahl. Très certainement Matilda. J’en garde un souvenir ému (j’avais même commencé à écrire une histoire « à la Roald Dahl » juste après, qui s’est arrêtée au premier paragraphe) et une passion éternelle pour cet auteur, dont j’ai relu les œuvres à Noël…

Dans quelles circonstances avez-vous écrit votre première nouvelle ?

La première nouvelle, mieux vaut ne pas en parler : je m’ennuyais en cours de français, j’avais vu la veille le film Vikings, avec Kirk Douglas, et j’ai pondu une nouvelle dans le même style. C’était atroce. La première digne de ce nom, ç’a été beaucoup plus tard, juste à la fin de mes études, quand mon petit ami de l’époque (devenu mon mari), s’agaçant que je critique tout le temps les romans que je lisais, m’a demandé pourquoi je n’écrivais pas moi-même, si j’avais tant d’idées… Il est allé prendre sa douche, je suis allée m’installer devant mon ordi. Et un texte intitulé Une autre forme de suttee est né, qui a été publié dans le fanzine Coprophanaeus. C’était le début.

Pourquoi écrivez-vous ?

J’ai le droit de répondre « parce que je le vaux bien » ? ou « Parce que c’est comme ça, na » ? Je ne sais pas pourquoi j’écris, parce que j’en ai besoin ? Parce que ça m’est naturel ? Parce que quand je n’ai pas le temps (ou que je ne le prends pas), je deviens hargneuse, grognon et je déprime ? Je ne sais pas, pourquoi vous faites du sport/macramé/scrapbooking, vous ? Et je le fais aussi parce que mon cerveau fourmille d’idées qui ont envie de sortir, parce que les mots trépignent de s’aligner, et parce que j’adore être publiée (soyons honnêtes)…

Pensez-vous qu’il faille être un grand lecteur pour être un bon auteur ?

C’est un avis très personnel, mais j’ai du mal à imaginer qu’on puisse écrire si on n’aime pas lire. Où en serait l’intérêt ? Après, est-ce que ça fait le « bon » auteur… Je me dis que la… quantité de livres ingérés doit aider à accroître le vocabulaire, à alimenter la culture (qu’elle soit littéraire ou linguistique), à élargir les idées… donc forcément, plus on lit, plus on aura de facilité à aligner les mots et à savoir construire des intrigues. Mais on peut aussi lire parcimonieusement, mais avec attention, et en retirer énormément de choses aussi. La culture peut venir d’autres formes que la lecture, mais je pense vraiment que pour être un bon auteur, il faut savoir se cultiver, garder l’esprit ouvert et ne pas rester sur ses acquis, toujours se remettre en question, faire des recherches et s’interroger. Et les livres sont quand même incroyables pour ça…

Votre formation d’architecte est-elle un plus pour écrire et construire des histoires ?

Heu…. bof ?

Ma formation d’architecte, je l’avoue, est plus un hasard qu’une vocation, même si j’ai eu la chance de travailler, ces dernières années, dans une agence avec des collègues agréables et des projets sympas. Mais je ne fais pas vraiment de lien entre ce métier et l’écriture. C’est de la construction, c’est vrai, mais je crois que mes autres centres d’intérêt (la danse, les animaux, les langues, Internet, la moto, le tatouage, la musique, etc.) ont beaucoup plus tendance à me guider dans mes recherches, ou à me fournir des amorces d’intrigues. Quant à la « construction » d’intrigues, je ne suis pas sûre non plus qu’il y ait un grand rapport avec l’architecture. J’ai mis très longtemps avant de construire mes scénarios avant d’écrire l’histoire. Au début, je me laissais vraiment guider par les images que j’avais, et tout découlait de là. C’est en me lançant dans le roman (et en me faisant piéger par le « oups, j’en suis au T3 et je ne sais pas comment me dépatouiller de toutes mes fausses pistes ») que j’ai compris que je devais mieux m’organiser. Donc j’ai appris par l’erreur…

Vous organisez des ateliers d’écriture et donnez des conférences. C’est important pur vous de partager votre savoir-faire ?

C’est même vital. Plus que le savoir-faire, c’est surtout l’expérience, l’amour des livres et la passion de certains thèmes que j’aime partager. C’est pour moi en lien direct avec l’écriture : un auteur peut très bien écrire, mais ne pas avoir envie d’être publié. S’il soumet un livre pour publication, c’est qu’il a envie que d’autres personnes découvrent son univers, ses histoires. À partir de là, c’est un désir de partager et de communiquer, que je mets en lien direct avec les ateliers et conférences. Les ateliers d’écriture, c’est aussi le plaisir d’aider d’autres personnes à mettre le pied à l’étrier, ou à se sortir d’une situation qui les bloque. C’est le plaisir de partager quelque chose qu’on a en commun, la danse des mots, l’imaginaire, la poésie. Et quand il s’agit d’ateliers avec les enfants, c’est l’espoir de déclencher une passion, l’envie de leur faire découvrir, pour certains, que la lecture et l’écriture dépassent le cadre parfois rébarbatif de la dictée et des lectures imposées…

Le jour où le père d’un de mes élèves, avec qui le contact avait été assez difficile au début, m’a dit que depuis les ateliers, son fils lisait tous les soirs, ç’a été une immense joie.

Sagas, romans ou nouvelles, dans quel format vous sentez-vous le plus à l’aise pour raconter une histoire ?

Au début, je n’aurais pas hésité une seconde à dire « nouvelle ». Je n’aurais jamais imaginé, à l’époque, me lancer dans cette usine à gaz qu’est le roman (encore moins la saga). Et un jour, je me suis aperçue que j’avais écrit plusieurs nouvelles dans le même univers, et qu’elles se suivaient à tel point qu’il suffisait d’en supprimer les titres et de rajouter un petit raccord pour que ça fasse un roman. Ça m’a totalement désinhibée. Et comme j’avais toujours du mal à garder un format… raisonnable pour mes textes, je suis passée au roman. Quant à la saga, ça s’est passé tout seul, lorsque l’intrigue d’un roman s’est avérée trop longue pour tenir dans un seul tome (qui était déjà un pavé). Donc le format dans lequel je suis le plus à l’aise, je dirais incontestablement le roman. Après, tout dépend de la longueur du roman…

Qu’est-ce que les littératures de l’imaginaire racontent de notre monde, de notre quotidien ?

À mes yeux, l’imaginaire permet de faire passer beaucoup de messages aux lecteurs sans pour autant leur donner l’impression de leur faire la morale. Les créatures surnaturelles permettent de traiter d’intégration, de religion, d’humanité sans donner dans le sermon, les situation dramatiques ou absurdes peuvent être source d’humour ou de réflexion quand tout est transposé dans un autre univers, ou quand le surnaturel permet de rajouter un élément qui éclaircit le propos. Cela permet aussi de transposer les problèmes de notre société sur un « ailleurs » où les solutions peuvent être différentes, et ça fait réfléchir sur celles qu’on pourrait utiliser dans notre monde. L’imaginaire (un peu comme le vampire) est un reflet de notre société.

Quelle est votre actualité littéraire ?

Je suis en train de travailler sur une multitude de projets divers : du polar, du fantastique Young Adult, de la romance paranormale, de la dystopie, etc. Mais également sur le prochain tome de Sainte Marie des Tome, qui sera l’opus de clôture de la série, et sur l’idée d’un spin-off. Le quatrième tome de cette saga sortira cet été, je l’ai remis le mois dernier à l’éditeur, et j’ai également deux autres romans en cours de soumission chez d’autres éditeurs. Et bien sûr, dans moins d’un mois, il y a la sortie d’un roman court chez les éditions du Chat noir, Black Mambo, qui propose trois romans (dont un de Morgane Caussarieu et un de Vanessa Terral) traitant de magie, d’Afrique et de femmes. Le tout teinté d’horreur…

Quel est le dernier livre que vous ayez lu ?

Ouf ! J’en lis beaucoup…

Le dernier que j’ai lu, c’est D’un commun accord, de Sophie Jomain (la suite de Recherche jeune femme avisée), qui est très agréable à lire. Et le premier tome de la série La Balance brisée, de Lise Syven. Je vais entamer le tome deux dans quelques jours. J’ai aussi hâte de lire la suite de la saga de bit-lit Requiem pour Sascha, d’Alice Scarling, dont j’ai adoré le début. Et de me plonger dans les dernières œuvres de Charlotte Bousquet, et la suite de Dans les veines, de Morgane Caussarieu. C’est horrible, j’ai pris trop de retard…

Sophie Dabat

Sophie Dabat

Architecte de formation, Sophie Dabat a d’abord été publiée dans plusieurs fanzines et revues avant d’être présente dans diverses anthologies de fantastique et de fantasy.

En 2006, elle aborde l’édition comme traductrice, correctrice et lectrice.

À partir de 2009, elle se lance dans l’écriture d’un roman de fantastique « young adults » qui sort en 2010 sous le nom de Changelins, T1 : Évolution, en même temps qu’un essai sur sa littérature de prédilection, la bit-lit.

Sainte Marie des Ombres, sa nouvelle série en cours, est publié depuis début 2014 chez Bragelonne, dans la collection primo-numérique Snark.

Travaillant aujourd’hui à plein temps dans l’édition, elle anime des ateliers d’écriture et donne des conférences sur son thème de prédilection : les littératures de l’imaginaire.

Pour en savoir plus sur Sophie Dabat : www.sophiedabat.com

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