Interview de Caroline Vié
Quel est le premier livre que vous vous souvenez avoir lu ?
« Astérix et le chaudron ». J’étais en CP et le livre m’avait été offert par mon institutrice de dernière année de Maternelle. Elle s’appelait Melle Saunois. Je l’aimais beaucoup. Elle doit être morte maintenant.
Autrement, « Trois hommes dans un bateau » de Jerome K. Jerome doit être un des premiers romans que j’ai lus. Il est toujours l’un de mes livres de chevet.
Dans quelles circonstances avez-vous écrit votre première nouvelle ?
Je devais avoir une dizaine d’années. Cela s’appelait « Bons baisers de la morgue » et c’était l’histoire d’une jeune femme qui travaillait dans une morgue et qui signait tous ses courriers ainsi. Elle se faisait tuer et sa dernière lettre arrivait chez son fiancé alors qu’elle était à la morgue comme cliente. C’était à l’occasion d’un concours de nouvelles pour enfants. Je n’ai pas gagné.
Pensez-vous qu’il faille être un grand lecteur pour être un bon auteur ?
Comme pour le cinéma, il n’existe pas de règle. Certains auteurs sont des autodidactes géniaux. D’autres, des rats de bibliothèques. Tarantino recycle brillamment ce qu’il a vu. Kitano réinvente le cinéma. Les deux sont grands.
Chacun de vos romans profite de booktrailers magnifiques. Votre côté journaliste de cinéma ?
Je suis surtout bien entourée de réalisateurs créatifs !
La vie d’auteur est une drôle de vie. Avez-vous une anecdote amusante à nous raconter ?
J’ai écrit mon premier roman Brioche (JC. Lattès) pour quelqu’un. Il s’est tué depuis.
À quand un roman dont la toile de fond sera un parc d’attractions ?
Les parcs d’attractions ont longtemps fait partie de mon quotidien. Je les adore mais ils ne nourrissent pas mon imaginaire. Du moins pour l’instant.
Un roman doit-il ancrer son intrigue dans le quotidien de son auteur ?
Pourquoi le devrait-il ? A mon avis, chacun choisit sa voie. Pour ma part et pour l’instant, je ne peux parler que de choses que je connais mais il ne s’agit pas d’une règle que je me suis donnée juste de mon fonctionnement actuel. Si l’écriture « doit » quelque chose, c’est de rester un espace de liberté pour l’auteur.
« Dépendance Day », votre dernier roman sorti en février, traite de la maladie d’Alzheimer. Est-ce qu’écrire, c’est refuser l’oubli ?
Dans ce cas précis, clairement. Ce livre comporte beaucoup de passages totalement inventés mais il est aussi conçu pour rendre hommage à ma mère et ma grand-mère. Pour que ma fille se « souvienne » de ces femmes qu’elle n’a pas connues.
Avez-vous en tête votre prochain roman ?
Bien sûr ! Cela parlera de jambon Pata Negra. L’une des plus belles choses au monde. Si mes parents n’étaient pas déjà morts, je les aurais tués pour m’en procurer.
Quel est le dernier livre que vous ayez lu ?
« Comment Thomas Leclerc, 10 ans 3 mois et 4 jours est devenu Tom l’éclair et a sauvé le monde » de Paul Vacca (éd : Belfond). Une petite merveille d’intelligence et de tendresse.
La question surprise de Paul Vacca
Chère Caroline, êtes-vous devenue dépendante à l’écriture ?
J’ai toujours aimé raconter des histoires avant même de savoir écrire. L’écriture a été une découverte incroyable pour moi car je suis d’une épouvantable maladresse pour tout ce qui est « travaux manuels ». À l’école, j’étais l’élève qui adorait le jour de la « rédaction » et redoutait celui de la leçon de dessin.
L’écriture est ensuite devenue mon gagne-pain. Manger est addictif. J’aime aussi écrire des lettres et des livres de fiction avec, il faut le reconnaître, un succès inégal (voire nul) auprès des personnes auxquels ils sont destinés. Comme je ne sais faire que ça, je m’obstine. Le jour où j’arrêterai, je serai résignée. Morte. Est-on dépendant à la vie ? La réponse est dans la question. Cette phrase pompeuse ne veut rien dire mais elle me plait bien.
Caroline Vié
Journaliste cinéma au quotidien « 20 Minutes ». Membre de la Commission de Classification du CNC.
Auteur de « Brioche » (2012) et de « Dépendance Day » (2015) aux éditions Jean-Claude Lattès.
A participé à l’anthologie Les Aventures du Concierge Masqué et en est fière.
Aime le Château d’Yquem et le jambon Pata Negra.
N’aime ni les comédies romantiques, ni les salsifis.
J’aurais bien lu « Bons baisers de la morgue », moi !