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Interview d’Arthur Ténor

11 Nov 2015

Royaume des sept tours_couvQuel est le premier livre que vous vous souvenez avoir lu ?

Vous allez croire que je plaisante, mais pas du tout. C’était Oui-Oui et la voiture jaune. Je devais avoir sept ans et c’est le premier « vrai » livre que mon papa m’a offert, qu’on lit tout seul comme les grands. Un merveilleux souvenir.

Pensez-vous qu’il faille être un grand lecteur pour être un bon auteur ?

Heureusement que non, sinon, je ne le serais pas, auteur (ce n’est pas à moi de dire bon ou pas). Je n’ai jamais été un « grand » lecteur. Juste un lecteur, à peu près régulier, mais surtout très éclectique. Ma chance a été de naître dans une famille dont le père était très grand lecteur. Il y a toujours eu des livres partout dans la maison. Alors bien sûr, quand on est enfant, c’est plus facile de s’approprier le goût de lire, ne serait-ce que pour faire « comme papa ». Sans cela, compte tenu de mes difficultés (la dyslexie) qui m’ont causé de grandes difficultés scolaires, je n’aurais sans doute jamais touché un livre. Quant à devenir écrivain… Même pas en cauchemar. Et pourtant ! Si des parents d’enfants jeunes lisent ces lignes, je ne saurais trop leur conseiller de laisser traîner ici et là plein de livres et de lire eux-mêmes, aussi, histoire de montrer l’exemple…

Comment s’est passée votre première rencontre avec un éditeur ?

De manière très surprenante. Il faut savoir que cette rencontre est le fruit d’une bêtise de ma part, à savoir l’envoi par erreur d’un projet de roman jeunesse dans une maison d’édition qui ne publie aucune fiction. Vous allez très vite comprendre mon étonnement. Le rendez-vous a eu lieu rue de Latour Maubourg à Paris, aux éditions du Cerf. Le Cerf, c’est l’éditeur de la Bible de Jérusalem. Je me présente à l’adresse, mais n’entre pas, me demandant si je ne me suis pas trompé d’adresse, car c’était la même qu’une librairie religieuse. J’entre quand même et en attendant mon rendez-vous, consulte à l’accueil le catalogue de la maison… L’histoire de Sainte Bernadette, les mémoires du pape, Saint Augustin… Je me gratte le front. Et voici que se présente un homme charmant, tout sourire : « Bonjour, je suis le frère Jean-Marie ». Le premier éditeur que je rencontrais dans ma vie était… frère dominicain. La suite est assez classique, enfin, presque. Tout ce que je peux dire, c’est que la proposition du directeur littéraire des éditions du Cerf fut une divine surprise, et une chance miraculeuse, car cela m’a mis le pied à l’étrier. Je lui en suis infiniment reconnaissant, au frère Jean-Marie.

Un auteur jeunesse doit-il absolument rester jeune dans la tête comme dans la vie ?

J’imagine qu’un barbon ronchon qui déteste les jeunes aura quelques difficultés à être un écrivain pour la jeunesse… encore que, je me demande s’il n’en existe pas. C’est aussi un des mystères de la création, la distance parfois abyssale qui peut exister entre la personnalité d’un auteur et ses œuvres. C’est pourquoi, je pense, que ce qu’est ou n’est pas un auteur est absolument sans importance, pourvu que ses romans soient extra !

Vous êtes également directeur de collection chez Scrineo Jeunesse. Ça fait quoi d’être de l’autre côté ?

Des guilis à l’ego ! Disons que, pour l’intéressé, cela prouve qu’il a acquis de l’expérience et que celle-ci est reconnue. Il peut légitimement la mettre au service, à la fois des éditeurs qui ont besoin des apports de professionnels confirmés, et des auteurs qui peuvent compter sur un interlocuteur très au fait de leurs contraintes, difficultés… et j’ajouterai de leur sensibilité.

La page Wikipédia qui vous est consacrée dit que vous êtes « un des auteurs français les plus lus ». Info ou intox ?

Peut-être les deux. Voyons, cela pourrait signifier quoi ? D’un côté, un écrivain qui a publié une centaine de romans, dont certains sont dans les rayons de pratiquement toutes les bibliothèques et tous les CDI de France, qui vend autour de 100 000 livres par an, doit pouvoir se vanter d’avoir pas mal de lecteurs. Donc, à votre avis, plutôt info ?
Mais d’un autre côté, à l’échelle cosmique… disons à celle des géants de la littérature contemporaine, cet écrivain là est un nain. Alors, plutôt intox, non ?

Je ne me sens pas en droit de répondre à ces questions.

La vie d’auteur est une drôle de vie. Avez-vous une anecdote amusante à nous raconter ?

Une drôle de vie ? Ben non, justement. Ma vie est des plus banals, et je m’en réjouis. Je n’ai malheureusement jamais reçu de demande de dédicace d’un extraterrestre, ni du fils du président de la République… Ah si, une petite anecdote que je raconte quand on me demande « qu’est-ce que ça fait d’être célèbre ? ». D’abord, je réponds : « Rien du tout, parce qu’un écrivain n’est que rarement célèbre, moi pas plus que les autres. Personne ne se jette sur moi dans la rue pour m’arracher ma chemise. » Et puis je raconte qu’un jour, je suis passé à la télé (France 3 Auvergne). Et que j’ai eu un beau reportage dans La Montagne, édition locale. Bref, le début de la gloire ! C’était un samedi, nous avions des amis à l’apéro, vers 18 h. Ding dong ! On sonne. Tiens, qui est-ce ? Je m’excuse auprès de nos invités et vais ouvrir. Deux loupiots de 10 ans, tout sourire, un carnet et un stylo à la main, s’écrient « M. Ténor, on peut avoir un autographe s’il vous plaît ! » Imaginez ma fierté devant mes amis. Le cœur battant, je signe, je remercie, je referme la porte, je retourne à l’apéro. Ding dong ! Oh, qui vient ? Deux autres enfants tout mignons. « M’sieur Ténor, on peut avoir un autographe, s’vouplaît ! » Mais bien sûr ! Le devoir accompli, je retourne vers mes amis m’efforçant de paraître trouver cela normal. Ding dong ! Encore ? Eh oui, un autre enfant. Et cinq minutes plus tard, un autre encore ! Grrr ! Tous les enfants du quartier s’étaient passés le mot. L’écrivain, il habite là, il signe des autographes… Du coup, j’ai été guéri pour toujours de mes fantasmes de célébrité. Que mes livres le deviennent, oh oui, je veux bien, mais s’vouplaît, surtout pas moi !

Pouvez-vous nous parler des romans aux fins alternatives ?

Lors qu’on lit un livre, le dénouement tant attendu vous est imposé par l’auteur. On peut être surpris, émerveillé… ou déçu. Quand c’est une fin de roman d’aventure jeunesse, on peut être quasi certain que d’une manière ou d’une autre, ça va bien se terminer. La fin heureuse est quasiment obligatoire (sauf peut-être dans les romans d’horreur !) Dans Le livre dont vous êtes ENCORE la victime, cela m’ennuyait d’imposer cette fin unique, même si je la trouve sympa et, je l’espère, satisfaisante pour les lecteurs. Du coup, j’ai suggéré à l’éditeur Pocket Jeunesse, d’écrire trois autres fins (sans me priver de la plus horrible et de la plus merveilleuse) à offrir au choix au lecteur sur une page dédiée du site PKJ. L’éditrice a trouvé l’idée originale et innovante. Elle a tout de suite dit oui, ce qui fait vraiment plaisir, car dans notre pays, idée originale = idée bizarre = risque = non, merci. Là, c’est mille mercis à l’éditeur !

Quelle est votre actualité littéraire ?

Deux romans auxquels je tiens beaucoup. Vous me direz, je tiens à tous, mais ceux-là ont un petit truc en plus qui accroîtra mon trac à l’approche de leur sortie. Le premier aura pour titre Je suis Charliberté ! Il sera en librairie en janvier, un an après que des fous de Dieu s’en soient pris à notre liberté d’expression. Cet événement m’a réellement atteint, non seulement parce que je suis un être humain horrifié par les actes de gens qui ont quitté la communauté des hommes, pas seulement parce que je suis un artiste qui a un besoin vital de cette liberté de respirer à la mienne façon, mais aussi parce que cela m’a renvoyé à un souvenir de jeunesse. En classe de seconde, j’ai participé à la création d’un journal lycéen satirique. Nos articles n’étaient franchement pas toujours tendres, notamment avec l’administration scolaire. Eh bien pourtant, jamais, pas une seule fois, nous n’avons été inquiétés ou freinés dans notre liberté d’écrire ou de dessiner. Quelle épouvantable régression nous menace ! Bref, je suis très heureux d’avoir trouvé un éditeur pour partager ce cri du cœur. Et devinez de qui il s’agit… Scrineo ! Toujours chez Scrineo, sortira le récit des circonstances exactes et par nécessité en partie imaginées de la mort d’Antoine de Saint-Exupéry. Ce sera Le mystère Saint-Exupéry, et en mai. C’était pour moi un vrai défi d’écrire sur ce personnage quasi mythique, sacré, en tout cas d’une dimension et d’une profondeur telle que j’ai beaucoup hésité avant de me lancer, plusieurs années.

Quel est le dernier livre que vous ayez lu ?

Oui-Oui et le camion rouge ! Non, là je rigole. C’était… Je ne sais plus. Je lis surtout les romans non encore publiés de mes camarades écrivains. Vous allez dire, ah mais vous êtes comme notre ministre de la culture ! Oui et non, car en fait, je lis bien plus qu’avant. Cela dit, sur ma table de nuit, depuis un certain temps, j’ai un récit de guerre dont j’ai bien dû lire… trois chapitres.

Arthur Ténor

Arthur Ténor

L’écrivain jeunesse Arthur Ténor, né dans l’Allier, est un adulte qui a su garder un cœur d’enfant. Il adore les contes de fées, les épopées fantastiques, les aventures historiques… et les histoires drôles. C’est pourquoi, quand on lui demande quel est son métier, il répond « explorateur de l’imaginaire ». S’il se définit plutôt comme un romancier de l’aventure, qu’elle soit historique ou fantastique, il est aussi un citoyen du monde, ou tout simplement un être humain que certains événements touchent en plein cœur. Il devient alors un romancier réaliste, témoin de son temps, en abordant certains thèmes « sérieux » ou graves (le harcèlement avec L’enfer au collège, chez Milan, la maltraitance avec Les anges pleurent en silence, chez Oskar, ou encore les atteintes aux valeurs de notre république avec Je suis Charliberté, chez Scrineo Jeunesse.)

En dehors de l’écriture, il apprécie beaucoup les rencontres avec le public, que ce soit sur les salons, en milieu scolaire ou autres.

Parmi la centaine d’ouvrages qu’il a publiés, on trouve : les Roman d’horreur ou Les Fabuleux (Scrineo Jeunesse), la série L’elfe au dragon (Seuil Jeunesse), Il s’appelait… le soldat inconnu et Guerre secrète à Versailles (Gallimard Jeunesse), ou encore Le livre dont vous êtes la victime (Pocket Jeunesse).

Thèmes majeurs de son œuvre :
Arthur Ténor écrit pour toutes les tranches d’âges, du CP au lycée et même jeunes adultes :
* romans historiques se déroulant au Moyen Âge, sous Louis XIV ou durant les deux guerres mondiales. Romans d’espionnage (ou policiers) médiévaux.
* romans plus intimes de type récit fiction (sur l’injustice ou les interrogations sur le sens de la vie)
* romans d’aventure fantastiques, et quelques policiers.

Pour en savoir plus sur Arthur Ténor : arthurtenor.canalblog.com

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