Interview de Valérie Simon
Quel est le premier livre que vous ayez lu ?
Bonjour Luc.
Ho ho, direct par un trou de mémoire ! Impossible de me rappeler ma première lecture… J’ai su lire avant 5 ans, donc je suppose qu’il s’agissait vraisemblablement d’un album illustré… Je me souviens que, très vite, j’ai éclusé la bibliothèque municipale et toutes les autres bibliothèques à ma portée… Je lisais surtout des romans, en particulier les histoires de loup (ah, Curwood et Jack London ! comme je les ai lus et relus). Et aussi des classiques remplis d’aventures comme Robinson Crusoé, Le dernier des Mohicans, Laura l’indienne blanche, Flicka, L’étalon noir, Bob Morane, Les Trois Mousquetaires, Les Cavaliers, Michel Strogoff… La liste est vraiment très longue… Puis je me suis découvert un faible pour les contes et les légendes des régions, des pays. Je me suis ensuite intéressée aux mythes, aux énigmes paranormales, aux mystères de la planète. Ah, ce fameux Triangle des Bermudes, cette Bête du Gévaudan, ce yéti et toutes ces étrangetés passionnantes !
Dans quelles circonstances avez-vous écrit votre première nouvelle, votre premier roman ?
J’ai écrit très tôt, vers l’âge de 10, 11 ans… Je ne me souviens plus exactement de ma toute première histoire, cela se passait en Afrique, il y avait des lions, je crois. Je venais de lire Le Lion de Kessel, alors, forcément, il y avait eu influence… J’avais détesté la fin. Franchement, ce lion qui meurt, quand on a 10 ans et qu’on aime les animaux, c’est moche. J’ai donc inventé une histoire qui ne le faisait pas mourir. Il devenait une sorte de super-animal domestique qui n’obéissait qu’à mon héroïne. Après réflexion, je crois que ce récit était déjà de la fantasy…
A partir de là, je n’ai plus cessé d’écrire. Je remplissais des carnets, des cahiers, des classeurs, des feuilles volantes, tout ce qui passait à ma portée… Maintenant, on qualifierait sans doute ces textes de fanfics, parce qu’ils reprenaient des histoires que j’avais aimées, que je tripatouillais à ma sauce.
Pourquoi écrivez-vous ?
Je ne sais pas. J’aime tellement lire qu’écrire fut rapidement une nécessité et une évidence. J’aime les mots. Depuis toujours, j’écris, y compris pour prendre des notes, recopier des recettes, des informations. J’aime le geste, j’aime le mode de pensée que cela induit… Je suis curieuse de tout. Ecrire me permet de mémoriser plus vite. Ecrire me permet également de m’évader, de m’affranchir du quotidien. C’est une sorte de main mise sur la vie, une façon d’analyser mes envies, de maîtriser mon destin, d’avoir du pouvoir… Ecrire me permet de vivre des vies en parallèle.
Pensez-vous qu’il faille être un grand lecteur pour être un bon auteur ?
Bon auteur, je ne sais pas. Auteur tout court, oui. Les deux sont liés. Pour maîtriser l’écriture, il faut avoir beaucoup lu. Lire forme l’esprit, permet d’acquérir du vocabulaire, de la syntaxe. Lire est la base de l’expression. Nous pensons tous avec des mots. Or lire nous permet d’acquérir ces mots, de développer nos connaissances, les subtilités de nos phrases, de nos réflexions, l’étendue de notre compréhension. Lire est une porte ouverte sur la liberté de notre pensée. Lire forge toutes les libertés.
Quelles sont vos habitudes d’écriture ?
J’écris tous les jours, de préférence sur mon ordinateur. J’ai un rythme régulier, comme si j’allais au travail. En période de création, je suis tellement prise par mon récit que je me réveille vers 4h du matin pour écrire. C’est le moment que je préfère. Il fait encore nuit, je vois peu à peu l’aube se lever. Tout est silencieux, figé. Il n’y a que moi et mon texte. C’est fabuleux. Je fais des pauses pour me préparer du thé. Je bois des litres de thé. Lorsque je suis fatiguée, que j’ai du mal à me concentrer, je fais des recherches. J’ai besoin de documentation visuelle, ça alimente mes descriptions. Avant chaque roman, je me constitue un dossier d’images. Je construis mon univers esthétiquement, pour qu’il soit bien net et bien clair dans ma tête. Plus tard, lorsqu’un passage « récalcitrant » me bloque, je me change les idées en allant promener la chienne, en marchant ou en prenant le bus. L’idée vient toujours, miraculeuse. Je crois que je peux écrire n’importe où, je n’ai qu’une seule obligation : pouvoir regarder dehors. J’ai besoin de donner à mon regard la possibilité de s’évader, de préférence vers un coin de verdure. Il me faut sentir les fleurs pousser et voir les oiseaux se chamailler. C’est assez paradoxal, car il me faut aussi le silence. Pas de télé, pas de radio.
Avez-vous approché d’autres auteurs pour leur demander des conseils ?
Au début de ma carrière, je n’étais pas du tout dans le milieu littéraire, je n’avais jamais imaginé que cela puisse être possible de discuter avec un auteur ! Plus tard, lorsque mon premier roman est paru aux Editions Fleuve Noir, on m’a présenté beaucoup d’écrivains d’imaginaire lors de salons ou de dédicaces en librairie. C’était génial, ils étaient tous adorables avec moi (il y avait des gens comme Pierre Bordage, Laurent Généfort, Pierre Pelot…). Mon problème, c’est que j’étais vraiment très timide. Je ne demandais rien, je ne parlais même pas. J’écoutais. Maintenant, j’apprécie énormément de rencontrer d’autres auteurs, pour discuter, échanger des points de vue et aussi faire un peu les fous. D’ailleurs, avec le développement des réseaux sociaux, c’est vraiment très facile d’avoir des contacts auteurs/auteurs et auteurs/lecteurs.
Vous êtes régulièrement invitée sur des salons littéraires. Qu’apporte à un auteur ce contact direct avec ses lecteurs ?
J’adore, tout simplement ! C’est mon côté vie sociale nécessaire. En période d’écriture, je ne bouge pas beaucoup de mon appartement, écrire est pour moi un métier solitaire. Alors, aller ensuite à la rencontre de mes lecteurs, cela me permet d’échanger, de parler de mes ressentis, de ce que j’ai essayé de faire, de dire. Certaines rencontres sont vraiment magiques, véritablement chargées d’émotion. J’ai plusieurs fois rencontré des lecteurs qui m’avaient lue des années auparavant et qui étaient vraiment très heureux de pouvoir me le dire. Ces moments sont incroyablement extraordinaires, particulièrement émouvants à mes yeux.
Vous êtes une auteur de fantasy. Pouvez-vous nous expliquer en quoi consiste ce genre ?
La fantasy est un genre imaginaire où le merveilleux, le surnaturel, la magie sont acceptés comme crédibles. Souvent, il s’agit du récit d’un rite initiatique et/ou d’une lutte symbolique entre le bien et le mal. Le récit prend alors ses sources dans les contes, l’histoire, les mythes. Pour un auteur, écrire de la fantasy, c’est carrément magique, car on peut tout réinventer, la faune, la flore, la géographie, l’ambiance sociale, économique, visuelle. On peut coller plus ou moins à une réalité médiévale ou, au contraire, s’en affranchir carrément. J’aime ce côté épique, aventureux, rempli d’action et cependant très humain. Il y a le bien, le mal, la conscience. Enfin, l’aspect visuel est très fort car il est nécessaire de décrire pour asseoir un univers qui a ses propres règles.
Quelle est votre actualité littéraire ?
J’ai plusieurs parutions prévues en 2015. Tout d’abord un recueil de 14 nouvelles qui parait depuis février aux Editions Bragelonne, dans la collection numérique Brage. Cette parution se fait nouvelle après nouvelle jusqu’à constituer un recueil que les lecteurs pourront alors se procurer en version papier, à la demande, chez n’importe quel libraire.
Chez le même éditeur, il y aura aussi deux textes hors recueil, uniquement en numérique, orientés romance sensuelle : Blanche dans la lumière du printemps et Septième ciel.
Puis en mai arrivera mon prochain roman, Coup d’Etat, le premier tome d’un cycle intitulé La Reine des Esprits. J’ai vraiment hâte, car le roman sera en grand format, avec une illustration de couverture magnifique réalisée par Yayashin Art, un illustrateur au talent merveilleux. Il paraîtra aux Editions du Riez pour le festival Les Imaginales à Epinal.
Enfin, courant 2015, sortira également un roman court intitulé Séismes. Il constituera avec deux autres novellas une anthologie sur le thème « Rencontres avec Dracula à Bucarest ». Ce livre très « crocs » sera proposé en papier et en numérique aux Editions Rebelle.
D’autres projets se confirmeront sans doute au fur et à mesure des mois, dont une novella et quelques nouvelles prévues dans des anthologies…
10 – Quel est le dernier livre que vous ayez lu ?
Je suis en train de lire : Guinevère la dame blanche, de Jean-Louis Fetjaine.
Valérie Simon
Valérie Simon est née en octobre 1963 à Strasbourg, en Alsace.
Rapidement, elle développe un intérêt passionné pour les sciences en général, la biologie en particulier, mais également le dessin vers lequel elle dirigera finalement son cursus universitaire.
Elle ne lit pas, elle dévore les stocks des différentes bibliothèques qui se trouve sur son chemin. Et vient très tôt à l’écriture pour mettre en scène ses propres histoires, et ses propres héroïnes…
Elle achève quelques œuvres de jeunesse mais n’envisage pas encore d’en faire son métier. Sous l’insistance d’une collègue, elle envoie un manuscrit chez Fleuve Noir. Ce dernier est retenu, il est publié en 4 tomes de 1997 à 1999 dans la collection Legend, sous le titre Arkem, la pierre des ténèbres.
En 2012, son cycle de Fantasy est repris par les Editions du Riez qui le rééditent en quatre tomes grand format, dans la collection Brumes Étranges. Depuis, Valérie Simon collabore à des anthologies et à des revues en proposant des textes qui parlent de sorcellerie ou de monstres tapis dans les imaginaires collectifs.
Son projet actuel est une saga mêlant science-fiction et fantasy en un roman d’aventures se déroulant sur un monde primitif peuplé de créatures carnivores. Ce projet a reçu de la part de la Région Rhône-Alpes une aide à l’écriture.
Pour en savoir plus sur Valérie Simon : www.valeriesimon.fr