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Interview de Nicolas Lebel

15 Mar 2015

Couv JDM 300dpiQuel est le premier livre que vous ayez lu ?

L’un des premiers livres dont je me souviens est L’Affaire Caïus, un polar dans la Rome antique, publié à la Bibliothèque Verte. Je devais avoir huit ans. Ce bouquin m’avait terrifié et emballé en même temps. Je ne sais s’il y a un lien avec les polars que j’écris aujourd’hui. Certainement.

Dans quelles circonstances avez-vous écrit votre première nouvelle ? Et, plus globalement, pourquoi écrivez-vous ?

Ma première nouvelle, c’était par amour, à 15 ans, et je ne dois pas être le seul à avoir pris la plume dans ces circonstances ! Une autre manière de dire ce qui ne passe pas par la voix, un moyen d’exprimer ce qui tord les boyaux. Il y a une pulsion d’écriture ou d’expression, comme il y a un Eros et un Thanatos ! Il y a une urgence à dire. Certains l’expriment par la musique, la danse… Je suis un piètre danseur.

Il y a aussi l’envie, le plaisir de conter. J’écris des histoires depuis longtemps : des nouvelles, des poèmes, mais aussi des scénarii de jeux de rôle dans des univers très variés. Le jeu de rôle permet d’écrire des récits dans lesquels le lecteur/joueur est acteur de l’histoire, interagit avec, et peut la modifier. Construire une réalité alternative fictionnelle est enivrant.

Pensez-vous qu’il faille être un grand lecteur pour être un bon auteur ?

Je doute qu’on puisse écrire ou écrire bien sans avoir lu, sans connaître les codes de l’écrit, que ce soit pour s’en inspirer ou pour les pervertir. On commence à écrire en copiant, avant de trouver une forme plus personnelle. Penser que l’on peut s’affranchir de ce qu’ont écrit les autres avant nous est un péché d’orgueil !

Mes polars rendent d’ailleurs hommage à ces auteurs. L’Heure des fous est un clin d’œil au polar français. On y croise Simenon, Boileau-Narcejac, Maurice Leblanc, Manchette, Pouy, Daeninckx, Vargas… entre autres. Les Romantiques sont aussi de la fête puisque Hugo et Sue s’y promènent et sont au cœur de l’intrigue. Le Jour des morts met à l’honneur les Réalistes du XIXème siècle. Le prochain parle de Baudelaire…

Quelles sont vos habitudes d’écriture ?

J’en ai peu. J’écris sur du temps volé ici et là, le matin, l’après-midi, le soir, la nuit… Je travaille dans le silence, même si, en fait, je n’entends rien de ce qui se passe autour de moi quand j’écris. Pas de radio, de musique… Il y a cependant quelques constantes : je commence toujours une session d’écriture en ouvrant mon dictionnaire ! (Ne me demandez pas pourquoi ! Un TOC, j’imagine). Ensuite, je corrige ce que j’ai écrit à la dernière session avant d’attaquer la suite. Enfin, je termine toujours une session en balisant ce que j’écrirai à la prochaine ; je sais toujours quelle partie je vais écrire en m’installant. Voila les quelques rituels que j’ai pu mettre en place.

Avez-vous approché d’autres auteurs pour leur demander des conseils ?

Le travail d’écriture est un plaisir solitaire. C’est une vraie bouffée d’oxygène que d’échanger avec des gens qui partagent les doutes, les difficultés que l’activité suscite. Je n’ai pas demandé conseil à des auteurs avant d’écrire, mais j’ai pu par la suite, après mon premier roman, en rencontrer pas mal et échanger sur les procédés. Certains font des plans très détaillés avant de commencer la rédaction, d’autres se lancent et suivent une idée, sans connaître ni l’histoire, ni la fin. Certains autres écrivent les scènes-clés puis les autres ensuite… Il n’y a pas de recette. Chacun fait ce qu’il peut et ce qu’il veut ! Je parle souvent cuisine avec Olivier Norek, Michael Mention ou Nicolas Jaillet ! On ne travaille pas du tout de la même manière mais ces discussions sont toujours enrichissantes.

Votre biographie prétend que soucieux de devenir le plus grand batteur de Métal de la planète, vous apprenez la batterie sous les encouragements de vos voisins. Est-ce un atout pour écrire une intrigue qui a du rythme ?

Il ne faut pas croire ce que dit mon biographe : c’est un menteur doublé d’un ivrogne. Je le soupçonne en plus de vouloir me nuire, sans vraiment connaître l’origine de cette haine incendiaire qu’il nourrit contre moi. Je l’ai renvoyé plusieurs fois mais il revient toujours, avec des chocolats et une bouteilles de whisky. Alors on s’assoit, on picole, on vide nos sacs. On rit, on pleure puis on se rabiboche. Jusqu’à ce qu’il me poignarde de nouveau…

Le rythme est primordial. Il ne sert à rien d’avoir des scènes percutantes, enlevées, si le lecteur s’ennuie pour y parvenir. J’utilise des codes-couleurs sur mes plans de chapitres pour distinguer les passages de narration des dialogues, les passages sombres des parties caustiques, pour m’assurer que les personnages reviennent régulièrement et ne pas en laisser un à la traîne. C’est une méthode qui me réussit bien !

Quant à la batterie, je viens de m’acoquiner avec Nicolas Jaillet, un autre auteur de polar, pour mettre certains de ses textes en musique. On ne fait pas du Métal, certes, mais on s’amuse beaucoup !

Est-ce votre nom qui a prédestiné cette envie d’écrire des romans policiers (cf Nicolas Lebel, l’inventeur du fusil Lebel) ?

Mon père était collectionneur d’armes. Il a trouvé amusant de me prénommer comme le Colonel qui a inventé l’un des premiers fusils à répétition. Je suis totalement innocent dans ce choix. J’ai en revanche été initié aux armes à feu dès l’enfance, ce qui m’a permis de placer un autre fusil, le Chassepot, au cœur de l’intrigue de L’Heure des fous…

Quelle est votre actualité littéraire ?

Je viens de rendre le manuscrit de la troisième enquête du capitaine Mehrlicht. Initialement intitulé Temps de guerre, il devrait finalement sortir sous le nom de Sans pitié ni remord, une citation de Baudelaire, en août prochain. Oui, c’est un scoop !

Je travaille en ce moment sur un script de long-métrage, une comédie dramatique…

Quel est le dernier livre que vous ayez lu ?

Soufflé par Des Nœuds d’acier de Sandrine Collette, j’ai lu son deuxième roman, un Vent de cendres, qui m’a beaucoup plu, même s’il est très différent du premier. Je l’ai trouvé plus onirique, presque gothique par moments. Une auteure qui a plusieurs cordes à son arc !

Nicolas Lebel

Nicolas Lebel

Nicolas Lebel est né à Paris où il vit encore aujourd’hui.

Après quelques allers-retours aux quatre coins du globe, il revient à Paris où il tente depuis plusieurs années d’enseigner l’anglais aux Français. Passionné de littérature et de linguistique, il publie en 2006 une première fiction, une épopée lyrique en alexandrins : « Les Frères du serment », qui sort dans un silence prometteur.

En 2013, il publie aux Éditions Marabout « L’Heure des fous », puis en 2014, « Le Jour des morts », deux romans policiers caustiques où histoire, littérature et actualités se mêlent, des romans noirs qui interrogent et dépeignent la société française contemporaine avec humour et cynisme, dont le ton est souvent engagé, et le propos toujours humaniste.

Par ailleurs, soucieux de devenir le plus grand batteur de Métal de la planète avant sa mort, Nicolas Lebel apprend à dompter sa batterie depuis quatre ans sous les encouragements de ses voisins. Adepte de Côtes du Rhône et de Whisky Islay, l’auteur s’astreint à des dégustations régulières parce que rien de grand ne se fait sans rigueur et discipline. La photo et les sports de combat achèvent de remplir un emploi du temps saturé.

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