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Interview de Mathieu Gaborit

25 Mar 2019

« Être du bond. N’être pas du festin, son épilogue. »

René Char

Feuillets d'Hypnos

Quel est le premier livre que vous vous souvenez avoir lu ?

Quelques souvenirs indélébiles : une nouvelle de Fritz Leiber dont j’ai perdu le titre. Fafhrd ou Souricier Gris, je ne me souviens plus, raconte la mort de sa femme dévorée par des rats. Ce n’est peut-être pas tout à fait cela, honnêtement, mais ce passage me hante encore. Et puis Howard avec sa nouvelle Les Clous Rouges, comme la révélation d’une Fantasy sombre et assumée. Bob Morane, aussi. Je dévorais ces bouquins sans modération à l’époque.

Un bon écrivain doit-il être un grand lecteur ?

Certainement. La lecture déverrouille et amplifie. C’est un nuage de mots et d’idées qu’on peut enrichir et tordre à loisir. J’ai le sentiment de m’affadir quand je ne lis pas, de clôturer mon langage. Quand l’écriture devient protocolaire, elle perd sa vitalité. Il faut lire pour s’élargir, il faut lire pour éviter la lassitude de son propre langage.

Comment reconnaît-on un écrivain de loin ?

À son authenticité. Écrire, c’est se dévoiler et mettre cette intimité au chevet de son l’histoire. En imaginaire, la franchise est un devoir et une exigence incontournable.

Comment êtes-vous passé des jeux de rôle au roman ?

Par ricochet. Tout se lie autour de l’imaginaire. Mon premier livre, Souffre-Jour, couvait depuis l’adolescence. J’écrivais sans y croire mais j’écrivais… Le jeu de rôle crée une approche de l’imaginaire panoramique. Il faut de nombreuses années avant de pouvoir convertir cette appréhension de l’imaginaire en littérature. J’ai une dette immense à l’égard du jeu de rôle. À bien des égards, il m’a incarné.

Comment définiriez-vous la science-fiction ?

Je vis la science-fiction comme une expérience d’expansion. Quand une histoire me happe, j’ai la poitrine ouverte. C’est un peu de ça : un vertige ouvert. On chute dans l’histoire en sachant qu’on ne percutera jamais le sol.

Quels sont vos auteurs de référence ?

Certains m’ont accompagné, d’autres sont là, chaque jour. Il y a eu Serge Brussolo pour son imagination débridée, Joël Houssin pour Argentine, G. Alec Effinger pour un cyberpunk immensément personnel, Gaston Bachelard pour son approche élémentaire, Dan Simmons et sa maîtrise inégalée de l’épure pour raconter une histoire.

Quelle est, selon vous, la meilleure retranscription sur grand ou petit écran d’un roman de science-fiction ?

Blade Runner, sans hésiter. L’élégance de ce film est pour moi une référence majeure.

La vie d’auteur est une drôle de vie. Avez-vous une anecdote amusante à nous raconter ?

Je garde un souvenir précis de l’époque Mnémos du temps où on travaillait avec Fabrice Colin dans une cave. C’est une approche finalement assez symbolique des premiers pas dans l’écriture. Bachelard dit qu’on descend toujours l’escalier menant à une cave et que c’est cette descente qui caractérise son onirisme. Avec le recul, je lui donne entièrement raison. On a déployé, là-bas, des racines jamais démenties.

Quelle est votre actualité littéraire ?

J’écris la suite et fin de La Cité Exsangue publiée l’année dernière dans l’univers des Crépusculaires. Ensuite, ce sera un roman d’anticipation que je porte en moi depuis des années.

Quel est le dernier livre que vous ayez lu ?

Simenon, avec Les fiançailles de Monsieur Hire.

Mathieu Gaborit

Mathieu Gaborit

Mathieu Gaborit, né le 25 août 1972, est un écrivain français, auteur de romans de fantasy et de science-fiction, également concepteur de jeux. Il est l’auteur de plusieurs suites romanesques de fantasy, dont Les Chroniques des Crépusculaires et Abyme dans l’univers des Crépusculaires ainsi que Les Chroniques des Féals.

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