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Interview de Pascal Fioretto - Paroles d'auteurs

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Interview de Pascal Fioretto

15 Mai 2015

1507-1Quel est le premier livre qui vous a fait marrer ?

Outre les BD de Gotlib et Goossens, en « littérature générale », je me souviens de fous rires irrépressibles à la lecture de The Hitchhicker’s Guide to the Galaxy de Douglas Adams puis j’ai enchaîné avec les petits bouquins de Desproges : Manuel du savoir-vivre à l’usage des rustres et des malpolis, Vivons heureux en attendant la mort, Dictionnaire superflu à l’usage de l’élite et des bien nantis… Dans la foulée, m’a traversé l’envie de faire aussi bien (mais j’en suis encore loin, à part pour l’usage des zeugmes que je maîtrise parfaitement).

Dans quelles circonstances avez-vous récolté le premier rire d’un lecteur ?

À l’occasion d’une rédaction de sixième. Le sujet était « décrivez le métier de vos rêves ». J’avais choisi « professeur de français » et je m’imaginais corrigeant des rédactions dont le sujet était « décrivez le métier de vos rêves » et je tombais sur une copie qui décrivait le métier de prof de français corrigeant une rédaction dont le sujet était « décrivez le métier de vos rêves » etc. C’était mal construit et mal maîtrisé (et sans véritable chute) mais l’idée avait beaucoup amusé ma prof’ de français. J’étais très fier.

Vous êtes diplômé de l’École Nationale Supérieure de Chimie de Montpellier. Quel est, scientifiquement, le bon dosage de l’humour ?

Mes études scientifiques, dont il ne me reste rien, m’ont néanmoins appris la rigueur voire le pinaillage et la chimie m’a enseigné l’art de l’analyse et de la synthèse, deux pratiques indispensables pour faire du pastiche. Je ne crois pas qu’il existe une formule universelle pour doser un gag (mais peut-être que Google travaille en secret sur un synthétiseur d’humour compilant toutes les formes d’humour pour en extraire l’algorithme sous-jacent). On dit souvent que l’humour est le plus court chemin entre deux personnes, donc je suppose que sa composition varie en fonction des deux personnes.

Pensez-vous qu’il faille être joyeux pour être un auteur drôle ?

Pourquoi pas… mais l’anxiété, la déprime, le pessimisme sont des alliés précieux dont l’humoriste aurait tort de se priver.

Aldous Huxley a dit « Les parodies sont les plus pénétrantes des critiques. » Est-ce qu’un monde qui accepte et revendique la parodie est le meilleur des mondes ?

Proust dit aussi que le pastiche, c’est de la critique littéraire en action. A mon humble avis, l’humour tend un miroir déformant au monde, il en grossit l’absurdité, il en dévoile les faux-semblants… Un monde qui accepte la parodie est préférable à un monde qui l’interdit. La Corée du Nord ressemble plus au « meilleur des mondes » de Huxley (en plus grossier) que la Grande-Bretagne où l’humour est une valeur nationale.

En 2010, vous avez reçu le prix Tortoni pour L’Élégance du maigrichon. Est-ce qu’à cet instant, le rire devient sérieux ?

Le Prix Tortoni est l’une des plus grandes distinctions que puisse obtenir un écrivain. C’est un prix qui fustige les mœurs moutonnières de la critique littéraire en distinguant un bouquin qu’elle n’a pas repéré par flemme ou par conformisme. Je ne suis pas sûr que « L’Élégance du maigrichon » méritait tant d’honneur mais les autres prix Tortoni, si !

La vie d’auteur est une drôle de vie. Avez-vous une anecdote amusante à nous raconter ?

J’en ai des milliers, je les ai compilées dans Petit dictionnaire énervé de nos vies de cons (L’Opportun) ; les autres, je les garde pour mes chroniques dans Fluide Glacial.

Dans votre dernier roman/récit, Un condamné à rire s’est échappé, vous avez décidé de ne plus faire rire. Pari réussi ?

Non, raté car on m’a dit que le livre est drôle.

La suite de vos aventures littéraires sera-t-elle drôle ?

J’ai bien peur que oui. C’est l’un des constats que je fais dans Un condamné à rire s’est échappé : impossible d’arrêter de rire sous peine d’angoisses. L’humour est un trait de caractère, une façon de s’adapter pour survivre. Je risque d’avoir du mal à faire du sérieux…

Quel est le dernier livre qui vous a fait pleurer ?

Jardins en temps de guerre de Teodor Ceric (Actes Sud). Pleurer de joie et d’émerveillement, j’entends.

Pascal Fioretto

Pascal Fioretto

Pascal Fioretto est né en 1962 à Saint-Étienne. Matheux contrarié, après un bac scientifique, il enchaîne avec un bac littéraire puis retourne à ses calculs et s’inscrit en Maths Sup. Diplômé de l’École Nationale Supérieure de Chimie de Montpellier, il cultive sa graphomanie sévère en fondant un journal étudiant puis intègre le gang des pastiches Jalons où les parodies de journaux et les livres s’enchaînent… Repéré par Marcel Gotlib et Bruno Léandri, il intègre l’équipe de Fluide Glacial, plaque son travail alimentaire et tente de survivre de négritudes littéraires en piges volantes…

En 2006, il publie un premier livre sous son vrai nom : Gay Vinci Code (Chiflet & Cie).

Il enchaîne, en 2007, avec Et si c’était niais (Chiflet & Cie), pastiche de 11 « grandes plumes » contemporaines françaises qui a fait, depuis, l’objet d ‘une édition dans la collection Classique & Contemporains à destination des lycées et collèges (Magnard).

En 2008, son recueil de pastiches des méthodes de développement personnel : La joie du Bonheur d’être heureux (Chiflet & Cie) lui vaut d’être classé plusieurs mois dans les meilleures ventes… des méthodes de Santé & Bien être.

En 2009, il sort un nouveau recueil de pastiches : L’Élégance du Maigrichon (Chiflet & Cie) puis, pour la rentrée littéraire 2010, un très discuté Petit Dictionnaire Énervé de nos vies de cons aux Éditions de l’Opportun.

Le 23 juin 2010, il reçoit le prestigieux Prix Tortoni.

Parallèlement, il a publié en 2007 avec Albert Algoud Le pacte secret (Albin Michel) et Élysée Machine (Hugo & Cie) puis, en 2009, La France Vue du sol (Chiflet & Cie) avec Bruno Léandri et Vincent Haudiquet Il a aussi travaillé à l’adaptation française du recueil de pensées de Jerry Seinfeld Le monde selon moi (Chiflet & Cie).

Il est actuellement complice de l’émission Des papous dans la Tête, le dimanche à 12h45 sur France Culture, plume avec Albert Algoud, pour la chronique quotidienne de Laurent Gerra sur RTL, chroniqueur au mensuel Fluide Glacial et scénariste pour la télévision.

Pour en savoir plus sur Pascal Fioretto : www.pascalfioretto.net

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